Efficacité, innocuité et modalités d'utilisation du jeûne modifié aux protéines

2010-07-12 | Modes d'intervention en santé

Des données publiées en 2004 indiquent que la prévalence de l’obésité est d’environ 21,4 % dans la population adulte québécoise. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) prévoit quant à elle une accentuation du phénomène dans la plupart des pays du monde, y compris au Canada, au cours des prochaines années. Or, il est démontré qu’obésité et embonpoint sont des facteurs de risque plus ou moins forts de survenue de maladies chroniques non transmissibles, aux conséquences graves à plus ou moins long terme.

Par ailleurs, le jeûne modifié aux protéines fait partie de l’arsenal thérapeutique disponible dans certaines cliniques médicales du Québec pour les sujets présentant un excès de poids et désireux d’obtenir un amaigrissement. Or, ce type de diète a été reconnue responsable d’une cinquantaine de décès survenus dans le courant des années 1970 et fait encore aujourd’hui l’objet de débats au sein même de la communauté scientifique.

L’AETMIS conclut que :

  • le jeûne protéiné n’est, en aucun cas, indiqué pour les personnes n’ayant pas d’excès de poids;
  • en cas de nécessité de perte de poids chez une personne, la recommandation première des experts en nutrition est de privilégier la prescription d’un régime hypocalorique modéré équilibré et personnalisé;
  • les experts sont divisés quant à la place du jeûne protéiné dans l’arsenal thérapeutique de l’obésité. Pour certains, le jeûne protéiné n’a pas de place dans la gamme des interventions nutritionnelles. D’autres, dans des prises de position officielle, n’excluent pas son utilisation considérant qu’il peut être utilisé pour des indications limitées.

L’examen des données probantes issues d’études portant sur la réalisation du jeûne protéiné dans un cadre de cliniques médicales montre, entre autres, que :

  1. l’observance de cette diète est difficile et que les taux d’abandons sont élevés;
  2. à court terme, la perte de poids obtenue est rapide et importante, et qu’elle s’accompagne d’une modification des paramètres cliniques et biologiques témoignant de l’amélioration de certains risques associés;
  3. son efficacité à long terme sur la perte de poids demeure actuellement plus incertaine, les résultats des deux méta-analyses évaluant cette dimension se contredisant.

Devant le manque d’efficacité à long terme de cette diète sur la perte de poids réelle et les dangers rapportés de cette dernière comparativement à une diète amaigrissante conventionnelle, et devant la nécessité d’un suivi médical, bien que peu documenté, associé à l’accompagnement multidisciplinaire par d’autres professionnels de santé, le principe de précaution médicale s’impose, tandis que celui d’abstention d’utilisation de ce régime doit être considéré. Lorsqu’utilisé, le jeûne protéiné devrait faire partie intégrante d’un plan global d’accompagnement du patient, mené par une équipe multidisciplinaire. Il serait important de dresser le portrait de l’utilisation de ce type de diète au Québec et des résultats obtenus. Cependant, la place des différents intervenants professionnels dans la conduite d’une diète visant à obtenir un amaigrissement intentionnel, y compris le jeûne protéiné, pourra difficilement être reconnue tant que l’on hésitera à se rendre à l’évidence que l’obésité est une affection chronique complexe exigeant une intégration de ses dimensions biologiques, sociales et psychologiques.

 

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